Bronchopneumonies des bovins

Mieux traiter les bronchopneumonies des bovins grâce à la modélisation

Bronchopneumonies des bovins

Les bronchopneumonies infectieuses (BPI) représentent un fardeau économique et de bien-être important pour la production bovine, affectant principalement les animaux en croissance. Ces maladies multifactorielles sont dues à une combinaison de différents agents pathogènes, de facteurs environnementaux et de stress, et sont majoritairement contrôlées par des traitements antibiotiques collectifs pour contrôler les épidémies. L’UMR BIOEPAR a évalué l’impact de différents critères de décision pour débuter un traitement collectif sur la propagation des BPI à l’aide d’un modèle simulant la diffusion de Mannheimia haemolytica dans une ferme d’engraissement multi-lots. Le modèle tenait compte des aléas et a exploré seize scénarios de composition des lots et de stratégies de traitement. Les résultats montrent qu’un critère basé sur la vitesse de propagation de la maladie pourrait réduire l’incidence des BPI et la consommation d’antibiotiques de manière plus efficace que les approches traditionnelles, basées sur l’atteinte d’un nombre d’animaux malades. Cette recherche met en lumière les bénéfices de pratiques de traitement responsables et la transparence quant à l'exposition aux risques dans la chaîne de production.

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© Cornell Univeristy_ArXiv

Figure 1. Distribution de l’incidence cumulée et du nombre de doses d’antibiotique utilisées. Les nuances de couleur sont plus foncées là où la densité est plus importante. Les croix représentent les points médians des distributions. Dans la première colonne, les animaux sont assignés aléatoirement dans les lots. Dans la deuxième, ils sont assignés par niveau de risque individuel. La première ligne correspond à des proportions de 30%, 40% et 30% d’animaux à faible, moyen et haut risque, respectivement, contre 10, 0 et 90% dans la deuxième ligne.

Contexte et enjeux 

Les BPI constituent un problème majeur dans le secteur de l’élevage bovin. Le levier de maîtrise principal pour les BPI est le traitement antibiotique. Il existe plusieurs stratégies d’administration de ce traitement : les animaux peuvent être traités individuellement s’ils sont détectés comme malades, mais les élevages peuvent également avoir recours à des traitements collectifs, qui consistent à traiter tous les animaux d'un lot. Le critère actuel pour déclencher des traitements collectifs n’est cependant pas basé sur des études scientifiques approfondies. Le modèle proposé par notre étude a pour but de comparer les stratégies de traitement couramment utilisées avec des stratégies expérimentales dans des populations et des contextes infectieux comparables, dans l’objectif d'identifier la stratégie présentant le meilleur compromis entre occurrence de cas infectieux et utilisation d'antibiotiques.

Résultats

Nous avons développé un modèle stochastique mécaniste permettant de simuler la propagation de M. haemolytica au sein d’un troupeau. Ce modèle permet de représenter précisément cinq processus interdépendants : l’état de santé, les signes cliniques, l’hyperthermie, la détection des cas, et leur traitement. Nous avons étudié 16 scénarios dans un bâtiment contenant 200 jeunes bovins distribués en 10 lots de 20 animaux. Chaque scénario est défini par la combinaison d'une stratégie de traitement, une proportion de niveaux de risque individuels et une façon de répartir les animaux au sein des lots. Les 4 stratégies de traitement sont : le traitement individuel et les 3 traitements collectifs selon le critère conventionnel ou les critères expérimentaux basés sur la pente ou la sévérité. Les troupeaux peuvent contenir 30 % ou 90 % d’animaux à haut risque de BPI (HR30 ou HR90, respectivement). Les animaux peuvent être répartis dans les lots de façon aléatoire (aléatoire) ou bien triés par niveau de risque individuel (trié). Chaque scénario est répété 200 fois pour tenir compte de la variabilité liée aux processus biologiques. Le modèle prévoit par scénario l'incidence de cas et le nombre de doses d'antibiotiques utilisées. Nos résultats révèlent que le critère de déclenchement basé sur la pente présente le meilleur compromis entre utilisation d’antibiotiques et incidence de cas.

Perspectives

Ce modèle remet en question les pratiques actuelles de traitement collectif en proposant un critère tout aussi efficace et moins coûteux en antibiotiques. Les futurs modèles pourraient également prendre en compte la co-circulation des agents pathogènes, donnant possiblement lieu à des infections mixtes pour lesquelles les conséquences de l’infection sont souvent amplifiées.

Valorisation

Ces travaux s'inscrivent dans le cadre du projet européen DECIDE (H2020) et sont soutenus par la Région Pays de la Loire. En plus de la publication (preprint, soumis pour recommandation à PCI Animal Science), les résultats ont été présentés en conférence internationale (SVEPM). Le modèle lui-même est diffusé en open source.