surveillance de la brucellose bovine par la modélisation

Évaluer le coût et l’efficacité de la surveillance de la brucellose bovine par la modélisation

surveillance de la brucellose bovine par la modélisation

La brucellose bovine est éradiquée en France depuis 2005, mais sa surveillance reste coûteuse. Cette étude vise à évaluer, par modélisation mécaniste et stochastique à base d’agents, l’efficacité et le coût de différentes stratégies de surveillance après réintroduction d’un animal infecté. Le modèle simule la diffusion de la bactérie Brucella abortus au sein des élevages, ses conséquences sanitaires (p.ex. avortements), et entre les élevages, en tenant compte des pratiques de gestion et des composantes du dispositif français (déclaration d’avortements, dépistage annuel, tests à l’introduction).
Les simulations montrent que la détection intervient après environ 49–51 semaines avec le système actuel, impliquant une à trois exploitations infectées. Supprimer les tests à l’introduction ou ne déclarer que les séries d’avortements améliore légèrement le rapport coût/efficacité, tandis que tester tous les adultes dans un tiers des exploitations est moins efficient. Le scénario le plus performant associe le dépistage annuel de 20 % des vaches adultes dans tous les troupeaux allaitants, la déclaration des séries d’avortements et l’absence de test à l’introduction. Ces résultats apportent aux décideurs des éléments quantitatifs pour optimiser la surveillance en conciliant coûts et risques sanitaires.

Contexte et enjeux

La France doit maintenir son statut « indemne » vis-à-vis de la brucellose bovine conformément à la directive européenne (≥ 99,8 % d’exploitations indemnes). Malgré la rareté des foyers (trois entre 2012 et 2021), la surveillance mobilise environ 17 M€ /an, dont 13 M€ à la charge des éleveurs. L’évaluation du rapport coût/efficacité du dispositif est donc cruciale dans un contexte de ressources publiques limitées et de diminution des moyens vétérinaires. 

Résultats 

Dans cette étude a été développé un modèle mécaniste et stochastique à base d’agents simulant la propagation de la brucellose bovine dans les élevages français, ainsi que sa détection par le dispositif national de surveillance. Ce modèle, construit avec le cadre open source EMULSION, intègre les pratiques réelles de gestion des troupeaux allaitants et laitiers, les mouvements d’animaux, et les modalités réglementaires de dépistage pouvant conduire à l’arrêté d’abattage. Les simulations montrent que le système actuel détecte en moyenne l’infection en 49 à 51 semaines après l’introduction d’un animal infecté, avec un à trois élevages contaminés au moment de la confirmation. 
Les scénarios alternatifs testés mettent en évidence plusieurs leviers d’optimisation : l’arrêt du dépistage à l’introduction ne dégrade pas les performances, tandis que la limitation du dépistage annuel à un tiers des troupeaux allaitants allonge les délais de détection et augmente les coûts. À l’inverse, la déclaration des séries d’avortements plutôt que des cas isolés permet de réduire les dépenses sans perte d’efficacité.
Au total, le scénario combinant ces ajustements (notification des séries d’avortements, dépistage annuel de 20 % des femelles adultes dans tous les troupeaux, sans test à l’introduction) réduit les coûts globaux d’environ 25 % (près de 6 M€) tout en maintenant une efficacité épidémiologique équivalente.

Perspectives 

Les travaux ouvrent la voie à une réflexion sur une évolution du système vers une surveillance basée sur le risque, ciblant les élevages à fort turnover ou liés à des zones à risque (faune alpine). L’approche de modélisation mobilisée, intégrant dans un cadre générique processus biologiques et dispositifs réglementaires, est transposable pour l’évaluation prospective d’autres maladies réglementées et l’aide à la décision pour les autorités sanitaires.

Valorisation 

Les résultats fournissent aux pouvoirs publics (DGAL, Anses, GDS) des arguments chiffrés pour engager une réflexion sur l’ajustement des protocoles de surveillance tout en maintenant la sécurité sanitaire. L’étude a également contribué à la diffusion auprès de l’Anses d’EMULSION, cadre open-source de modélisation épidémiologique développé à INRAE. Ces travaux, qui s’inscrivent dans la thèse de doctorat de Sofia Mlala (Anses), ont été publiés en open access dans Veterinary Research.

Mlala S, Picault S, Sala C, Villard P, Vinard J-L, Hénaux V (2025) Assessing the efficiency of the bovine brucellosis surveillance-control system in a disease-free context through agent-based modelling. Vet Res 56:120.
https://doi.org/10.1186/s13567-025-01549-1

Collaborations internationales ou partenariales associées

Collaboration avec l’Anses